LE DROIT DE L'ENFANT D'AVOIR UN NOM ET UNE NATIONALITE
Si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d'entre eux, les États parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible.
La Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant (articles 7 et 8) prévoit que l'enfant doit être enregistré aussitôt après sa naissance et avoir dès lors le droit de porter un nom, d'acquérir une nationalité et de connaître ses parents. Les États parties à cet instrument s'engagent à respecter le droit de l'enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels qu'ils sont reconnus par la loi, sans ingérence illégale. Si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d'entre eux, les États parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible.
L'existence d'un enfant ne peut être reconnue officiellement si la naissance de celui-ci n'a pas été enregistrée selon la procédure fixée par la loi. Par conséquent, un tel enfant ne figurera pas dans les statistiques officielles et ne sera pas reconnu comme membre à part entière de sa collectivité.
L'acte de naissance d'un enfant est la preuve de la reconnaissance de son importance pour l'État et de son statut au regard de la loi. La déclaration de naissance donne lieu à l'enregistrement permanent et officiel de l'existence d'un enfant à certains échelons de l'administration publique.
C'est cette procédure qui permet à l'enfant d'avoir un nom et d'acquérir une nationalité. Elle constitue le point de départ de la protection des droits fondamentaux de l'enfant à une identité et à l'existence. En plus d'être la première étape de la reconnaissance juridique de l'existence d'un enfant, l'enregistrement de la naissance est important pour la satisfaction d'un certain nombre de ses besoins pratiques.
En effet, l'absence d'un acte de naissance peut empêcher un enfant de s'inscrire à l'école ou de recevoir des soins de santé, des compléments alimentaires ou des prestations d'assistance sociale. Les documents d'identité peuvent permettre, entre autres mesures, de retrouver facilement les parents d'un enfant en cas d'urgence ou de protéger l'enfant lui-même contre le mariage précoce, le travail des enfants, l'enrôlement prématuré dans les forces armées ou les poursuites judiciaires devant les tribunaux pour adultes, le cas échéant. On indique qu'en 2000, plus de 50 millions d'enfants de moins de cinq ans à travers le monde n'avaient pas fait l'objet d'une déclaration de naissance. Ces enfants provenaient en majorité soit de familles pauvres, marginalisées ou déplacées, soit de pays où les systèmes d'enregistrement des naissances étaient inexistants ou défaillants.
Selon certains spécialistes, les enfants de moins de cinq ans qui ont été privés du droit à l'identité ont tendance à être pauvres, à vivre en milieu rural, à avoir un accès limité aux soins de santé, à ne pas s'intégrer au milieu scolaire de la première enfance et à avoir des niveaux de malnutrition et des taux de mortalité très élevés. Il est possible qu'ils aient été mis au monde sans l'assistance d'un professionnel de la santé ou d'un accoucheur, et que leurs mères aient eu un niveau d'instruction très bas et ne soient pas en mesure de discerner les signes de certaines maladies infantiles. Il y a des chances que la naissance de ces enfants ait été déclarée à un certain stade de leur vie, mais un nombre considérable d'enfants deviennent grands sans avoir jamais été enregistrés.
Outre le rôle qu'il joue en matière de protection, un bon système d'enregistrement des naissances et d'état civil peut fournir au pays une base de données à jour et fiable pour la planification. Un tel outil serait utile pour la planification à l'échelle nationale et pour les structures locales chargées de l'éducation, de la santé et d'autres services sociaux au sein des collectivités.
- Le fait que certains parents n'enregistrent pas la naissance de leurs enfants peut être dû à diverses raisons, notamment :
L'éloignement du lieu d'enregistrement des naissances; - Le manque de renseignements sur la procédure de déclaration des naissances;
- Le manque de ressources (incapacité d'acquitter les frais d'enregistrement);
- La léthargie de l'appareil bureaucratique;
- Le manque d'intérêt de la part de certains parents qui ne voient pas l'avantage que l'enregistrement de la naissance pourrait procurer à leurs enfants.
Compte tenu de ce qui précède, l'État doit chercher à améliorer sensiblement le processus d'enregistrement des naissances en prenant les mesures suivantes :
- Rendre la procédure d'enregistrement des naissances accessible et disponible à tous les enfants, notamment à ceux qui sont des demandeurs d'asile, des réfugiés ou des immigrants;
- Mettre l'accent sur la décentralisation et les campagnes de mobilisation et d'information du public avec la participation active de la société civile, des autorités confessionnelles et des organisations non gouvernementales nationales et internationales;
- Prendre des dispositions en vue de la suppression des frais d'enregistrement des naissances;
- Éliminer les barrières juridiques et administratives telles que l'obligation pour les parents des enfants de présenter leurs pièces d'identité;
- Prévoir la procédure d'enregistrement au niveau de la formation sanitaire ou la naissance a lieu;
- Réduire les disparités qui existent entre les zones urbaines et les zones rurales en matière d'enregistrement des naissances afin d'assurer une protection uniforme des droits de l'enfant;
- Concevoir et mettre en œuvre des programmes innovants tels que les campagnes d'enregistrement des naissances à domicile;
- L'amélioration du niveau d'éducation et des connaissances des mères afin d'améliorer les taux d'enregistrement des naissances;
- Mettre à disposition des ressources suffisantes pour l'enregistrement de tous les enfants sans discrimination;
- Déployer un personnel qualifié, efficace et bien outillé pour fournir des services d'enregistrement des naissances partout où cela est nécessaire;
- Déclarer l'enregistrement des naissances obligatoire;
- Modifier la législation en matière d'enregistrement des naissances, s'il y a lieu. Il ressort de ces considérations que la question de l'enregistrement des naissances est de toute évidence liée à celle de la nationalité des enfants.
La nationalité est le droit, fixé par la loi, d'appartenir à une nation donnée. Elle est parfois définie au sens large comme la relation entre les personnes et leur pays d'origine, notamment en termes d'identité culturelle, d'association, d'affiliation ou de loyalisme.
La nationalité fonde l'autorité de l'État sur les personnes, de même qu'elle garantit aux personnes la protection de l'État. Il appartient à chaque État de déterminer ses nationaux.
La nationalité peut être établie à la naissance par le lieu de naissance de l'enfant ou le droit du sol (jus soli) et/ou par la lignée ou le droit du sang (jus sanguini).
L'enfant peut aussi acquérir sa nationalité plus tard dans la vie, par le biais d'une procédure appelée naturalisation.
ISSA TOURE
DOCTEUR EN DROIT
MAGISTRAT HORS HIERARCHIE